Institut Ayalon
La période du mandat britannique en Palestine n’a duré que 30 ans, mais elle a laissé de nombreux sites qu’on peut voir aux quatre coins d’Israël. Des forts militaires, des installations électriques, des systèmes d’eau, des prisons…. Des journées entières de visites pourraient être consacrées à cette période du 20ème siècle. Un des sites les plus remarquables est sans conteste l’Institut Ayalon. Ce site est situé à une vingtaine de kilomètres au sud de Tel Aviv, à côté de Rehovot. Il s’agit d’un kibboutz crée dans les années 1930 avec pour mission officielle de former les nouveaux immigrants qui voulaient habiter et travailler dans un kibboutz. Officieusement, ce kibboutz a été créé pour fabriquer des armes pour le Palmah, l’unité d’élite de la Haganah (groupe de défense juive).
Yossef Avidar, chef des industries militaires clandestines israéliennes, avait mis en place un plan pour faire venir des machines pour fabriquer des balles. En effet, la difficulté principale à l’époque ne résidait pas dans la fabrication des armes mais des balles. Il s’agissait de fabriquer en très grande quantité des balles de 9 mm pour les mitraillettes Sten utilisées par les groupes de défense sionistes.
Le site du Kibboutz Ayalon a été choisi car il était à quelques centaines de mètres d’une caserne militaire britannique et d’une gare. Quel intérêt à être à proximité d’une caserne britannique ? C’était l’idée de Yossef Avidar : « les britanniques n’iront jamais chercher des activités clandestines à proximité de leur caserne car il faudrait être fou pour faire ça sous leur nez !!! ». Pourquoi près d’une gare ? Car les machines de fabrication de balles vont faire un bruit terrible et il sera masqué par les trains.
La Haganah va recruter un groupe de 45 adolescents et jeunes adultes et se lancer dans cette mission top secrète dont ils ne pouvaient parler à personne.
C’est ainsi qu’en deux semaines (!!!) une usine clandestine de fabrication de balles est aménagée. Elle se situe 8 mètres sous le kibboutz, et on peut y accéder par la buanderie du kibboutz. Tout a été pensé : un système de ventilation avec renouvellement d’air régulier, des fours et des machines à laver pour couvrir le bruit et l’odeur de l’usine, un pas de tir pour essayer les balles, des rations de nourriture supplémentaires pour les jeunes qui travaillaient dans l’usine et même des lampes à UV pour compenser le manque de vitamines D dû à leur faible exposition au soleil. Chaque soir, une inspection très minutieuse était faite pour s’assurer que les travailleurs ne portent aucune trace de leur activité sur eux : vérification des cheveux, chaussures, vêtements….
Pour justifier d’une utilisation intense des machines à laver (qui tournaient toute la journée pour masquer les bruits des machines de l’usine clandestine), le kibboutz va proposer des services de buanderie aux résidents extérieurs du kibboutz. Et quand des britanniques commencent à venir au kibboutz pour bénéficier de ces services, on leur proposera un service de récupération/livraison pour éviter la présence anglaise au kibboutz Ayalon.
On peut également voir les différents moyens utilisés pour sortir les balles de l’usine : jarres de lait à double fond, camion de livraison de carburant avec des caches….
Cette usine va fabriquer plus de 2.5 millions de balles pendant trois ans entre 1945 et 1948. C’est plus de 40 000 balles par jour qui sont fabriquées au plus fort de l’activité. C’est ainsi que de nombreuses batailles de la Guerre d’Indépendance ont pu être gagnées grâce à ces balles. David Ben Gourion a reconnu l’activité extraordinaire de ces jeunes pendant 3 ans qui ont largement aidé à gagner la Guerre d’Indépendance.
A partir de l’indépendance d’Israël le 14 mai 1948, cette usine n’aura plus besoin d’être clandestine et le site sera déplacé.
Les 45 jeunes qui ont participé à cette formidable aventure vont rester ensemble après la guerre d’indépendance et créer le kibboutz Ma’agan Michael en 1949, près de Zichron Yaakov. Ce n’est que 30 ans après le début de cette aventure, en 1975, que cette histoire a été révélée au grand public.
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